Escrocs au CO2 en jugement

Publié le par Laute Alain

La mafia du CO2 se déchire à la

barre du tribunal

4 mai 2016 | Par Michel Deléan (extraits).

" Derrière les bons mots et le folklore de l’arnaque miraculeuse de centaines de millions d'euros à la TVA, les prévenus du procès de la fraude au CO2 s’accusent mutuellement face au tribunal correctionnel, sur fond de violence. Assassinats, menaces et omniprésence de gardes du corps viennent en effet teinter cette escroquerie d’un parfum mafieux très présent.

Une escroquerie ingénieuse, des personnages hauts en couleur : le procès de l’escroquerie au marché du CO2, qui s’est ouvert lundi 2 mai à Paris, est par moments franchement amusant, comme l’était le dossier du Sentier. Dans le rôle du beau voyou, Mardoché « Marco » Mouly livre ainsi un grand numéro. Traits burinés, teint hâlé, mise plus que soignée, cet autodidacte de 50 ans, qui se présente comme « commercial dans l’immobilier », a déjà été condamné trois fois pour des escroqueries aux encarts publicitaires, à la TVA sur du matériel informatique, et enfin à la TVA sur de la téléphonie.

« Vous allez me condamner deux fois m’sieur le président, j’ai pas bien compris ? », lance-t-il à l’ouverture du procès, en forçant un peu son accent juif tunisien. Il fait encore rire l’assistance en lâchant que son ancien avocat, Thierry Herzog, était « trop gourmand ».

Après une journée de lundi consacrée aux incidents de procédure, les débats ont vraiment commencé ce mercredi 4 mai devant la XXXIIe chambre correctionnelle, et le show Mouly s’est poursuivi. Rebondissant sur la lecture d’un procès-verbal qui le contrarie, Marco Mouly sort cette réplique de cinéma : « Moi, mettre des Timberland ouvertes avec un costume ? Impossible. Vous savez combien il me faut pour m’habiller ? Trois heures », répond lui-même le dandy sépharade. « Mettre ça avec un costume en lin blanc ? Il me prend pour un ridicule ! »

On rit encore lorsque Marco Mouly sur-joue la modestie et l’illettrisme face au président du tribunal, Peimane Ghaleh-Marzban, en lui jurant « je sais que vous êtes le patron », en s’excusant de l’interrompre sans cesse, en le prévenant qu'il sort « vomir pour de vrai », ou encore en lui offrant ce compliment : « Je vous promets, m’sieur le président, j’ai dormi avec vous hier, vous êtes dans ma tête, j’adore votre façon de parler. » Le magistrat sourit, mais n’est pas dupe. Surtout, il connaît son dossier sur le bout des doigts.

On commence à examiner le fonctionnement des différentes sociétés – « propres » ou pas, selon les mots d‘un des prévenus –, qui ont servi à l’arnaque. Le mécanisme de cette escroquerie était simple : en substance, il suffisait d’avoir des sociétés françaises pour acheter des droits à polluer à l’étranger sans TVA, revendre ces mêmes droits en touchant cette fois-ci la TVA, tout en omettant de la reverser à l’État, et en renouvelant l’opération autant de fois et aussi vite que possible. Les failles du dispositif étaient béantes. « Plus facile que ça, c’était pas possible, même voler une pomme ! Tout était ouvert », résume Marco Mouly, tout en prenant soin de minorer son propre rôle et ses compétences.

« Moi, j’ai voulu faire du carbone. La vérité, c‘est de l’oseille, c’est de l’argent, c’est cadeau », reconnaît-il. Mais attention, « moi j’ai travaillé dans la téléphonie, j’y connaissais rien au carbone », nuance aussitôt Mouly. « Ensuite j’ai vu Sebag [Frédéric Sebag, un des prévenus réfugiés en Israël - ndlr]. Lui, il a 9 millions dans son compte personnel ! Il a des comptes à Hong Kong, à Chypre, à Tunis ! Il est recherché dans cinq dossiers ! », balance Marco Mouly..."

(Lire la suite sur le site Mediapart).

 

Publié dans Société

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