Hollande se prépare pour 2017, via 14 juillet 2016

Publié le par Laute Alain

14-Juillet :

Hollande se justifie pour mieux se

présenter

14 juillet 2016 | Par Lénaïg Bredoux

Le président de la République s’est livré à un exercice d’autosatisfaction, promettant une nouvelle fois de ne rien changer, y compris dans la gestion de son équipe, entre Valls et Macron. Il prépare sa candidature pour 2017.

Ne rien changer. Fidèle à la ligne qu’il suit depuis l’automne 2012, François Hollande s’est livré jeudi, pour le dernier 14-Juillet de son quinquennat, à un exercice d’autosatisfaction. Sur son bilan, sur sa politique économique, et sur sa gestion des tensions gouvernementales, à leur niveau maximal entre Manuel Valls et Emmanuel Macron. Le président de la République, qui dira en décembre s’il se représente, continue de préparer sa candidature en se posant en garant de la « maison France ».

L’ambiance, délétère, de sa fin de mandat n’y change rien. Le cas Macron en est une bonne illustration. Le ministre de l’économie, ancien secrétaire général adjoint de l’Élysée, multiplie pourtant les provocations, allant jusqu’à tenir meeting à Paris deux jours avant la fête nationale. Le premier ministre Manuel Valls est excédé. « Il faut que cela s’arrête », a-t-il dit mardi 12 juillet, avant de s’en prendre au « populisme » d’Emmanuel Macron. Dans les allées du pouvoir (et dans les salles de rédaction), les ministres, les conseillers, les députés n’en finissent pas de spéculer sur l’avenir du gouvernement : Valls va-t-il démissionner ? Macron va-t-il être congédié ? Partir de lui-même ? Que cherche François Hollande, semblant parfois imiter François Mitterrand lançant Bernard Tapie contre Michel Rocard ?

Pour anecdotiques qu’ils soient, ces questionnements sont révélateurs de la pratique du pouvoir sous ce quinquennat. Ils disent l’instabilité permanente dans laquelle la majorité a été plongée, le trouble des proches les plus fidèles de François Hollande, les tensions au sein d’une équipe pourtant confrontée à un chômage de masse, à une menace terroriste élevée et à un risque de « dislocation », pour reprendre l’expression présidentielle, du pays et de l’Europe. Et ils disent aussi l’absence de débat sur le fond : les divergences de ligne entre François Hollande, Emmanuel Macron et Manuel Valls relèvent bien plus de la nuance que du désaccord.

Jeudi, François Hollande a maintenu cette étrange atmosphère. À son ministre de l’économie, pour la deuxième fois en quelques mois, le rappel des règles ; à son premier ministre, un hommage appuyé. Mais rien de plus. « Il y a des règles dans un gouvernement. La première règle, c’est la solidarité, de défendre le bilan, d’être à plein temps dans sa tâche. Et puis, il y a servir jusqu’au bout », a redit le président de la République. « Ces règles essentielles sont celles de la composition d’un gouvernement. Ne pas les respecter, ce n’est pas y rester. […] Chacun maintenant est informé. » Quant à Valls, « je l’ai nommé pour diriger le gouvernement. Il le fait avec autorité, courage, en ayant le sens de l’intérêt général, et aussi avec sa personnalité », a dit Hollande. Avant d’ajouter : « Je veux que le pays soit dirigé fermement, clairement. »

Comme toujours, François Hollande tente de ménager tous les équilibres. Convaincu que son habileté tactique est sa meilleure arme politique, il continue d’atomiser un à un ses adversaires politiques. Il n’hésitera pas à sacrifier Emmanuel Macron, comme il l’a fait par le passé avec Arnaud Montebourg et Benoît Hamon, s’il le faut. Mais, en attendant, ces tensions intra-gouvernementales ont écarté, pour le moment, l’hypothèse d’une candidature de Manuel Valls, plus isolé que jamais, et affaibli par l’échec de la réforme constitutionnelle et la contestation de la loi sur le travail.

Il y a quelques mois encore, c’était pourtant le premier ministre qui pouvait concurrencer François Hollande à la présidentielle. C’était contre son influence qu’ils jugeaient trop importante et dangereuse pour leur champion que les proches du président prétendaient ourdir. C’était contre Valls qu’ils demandaient à Hollande d’agir. Donnant, à chaque fois, le triste spectacle d’une vie politique davantage animée par des querelles personnelles que des disputes de projet.

Sur le fond, d’ailleurs, le président de la République, embarqué dans une polémique sur le salaire de son coiffeur, a simplement promis de ne rien changer, tant il est persuadé d’avoir eu raison. « Ça va effectivement mieux », a-t-il dit, en référence au « ça va mieux » lancé en avril. « Nous aurons une baisse du chômage à la fin de l’année. […] Il va falloir poursuivre la politique que j’ai engagée. » Avant d’insister : « Les choix que j’ai faits étaient les bons. C’était le bon cap. Et je pense qu’il faut le suivre. » François Hollande est convaincu qu’il laissera la France en meilleur état en 2017 qu’il ne l’a trouvée en 2012. « Quand je terminerai mon mandat, je pourrai dire que, sur un sujet majeur comme l'emploi, j'ai fait avancer mon pays. »

Tout à la défense de son bilan à un an de la présidentielle, le chef de l’État est même allé jusqu’à nier l’évidence depuis la salle des portraits de l’Élysée : « Ceux qui n'ont pas tenu leurs promesses sont ceux qui m'ont précédé. Pour ce qui me concerne, j'ai tenu tous mes engagements. » Et jusqu’à faire le parallèle entre la loi sur le travail et le Front populaire. « Je m’inscris dans cette histoire-là », a glissé le président sans annoncer de nouvelles mesures en dehors du budget qui sera discuté à l’automne.

2017 en père de la Nation

Même sur le dossier européen, pourtant au cœur du message présidentiel depuis le vote des Britanniques le 23 juin, François Hollande n’a guère été précis. Il s’est contenté de rappeler qu’il voulait que la Grande-Bretagne entame le plus rapidement possible les négociations du Brexit – il a appelé la nouvelle première ministre Theresa May mercredi. Y compris parce que si la conjoncture économique s’améliore un peu, la reprise de la croissance en France est menacée par l’incertitude entourant l’avenir du voisin britannique.

Sur la relance du projet européen qu’il a appelée de ses vœux, Hollande a répété que l’Union devait être plus protectrice. « J’ai proposé une nouvelle impulsion. Pour moi, l’essentiel, c’est la protection des Européens. Elle ne protège pas ses frontières, par rapport au risque terroriste, les mouvements de certaines personnes, les salariés, par rapport à certaines négociations commerciales », a-t-il énuméré. Mais à part demander « un budget supplémentaire sur cette question de la protection », le doublement du plan Juncker sur les investissements et un gouvernement de la zone euro, le projet français reste très flou. « Ce qui a manqué, c’est le contrôle démocratique. Là aussi je ferai des propositions », a simplement dit François Hollande qui visitera plusieurs pays européens la semaine prochaine avant le sommet de Bratislava prévu à l’automne.

Interrogé sur le débauchage de l’ancien président de la Commission José Manuel Barroso par la banque Goldman Sachs, le président s’est contenté d’une condamnation morale, refusant – par exemple – de demander à renforcer les règles sur le pantouflage au niveau européen. « Cela relève de la morale. C’est moralement inacceptable », a affirmé Hollande. Au passage, il a glissé à l’endroit de Nicolas Sarkozy : « C’est pas moi qui l’ai choisi, M. Barroso. » Mais sans rappeler que c’est bien lui qui l’a décoré de la Légion d’honneur.

Dans le paysage en ruines de la gauche française, le président de la République reste persuadé qu’il a encore ses chances pour la présidentielle de 2017. Avec un message qui rappelle évidemment – et c’est un fait exprès – celui de François Mitterrand en 1988 : la protection de l’unité de la France. « L’idée majeure, celle qui m’anime, qui pourrait justifier d’aller devant les Français, ce que je n’ai pas décidé […], c’est l’idée que notre pays puisse être maître de son destin, qu’il y ait la cohésion, nationale, sociale, culturelle. Parce que nous avons besoin d’être rassemblés », a-t-il expliqué, interrogé par TF1 et France 2. Le Front national et la droite menacent la France de « dislocation », estime Hollande, parlant de « la maison France que je dois protéger ». « Elle peut à tout moment se séparer », a-t-il dit.

Prenant des accents parfois graves sur « la mort, la tragédie », le président a estimé que « l’enjeu de 2017, c’est un enjeu beaucoup plus important qu’en 2012 ». « En 2012, il fallait que le pays se redresse. [En 2017, ce sera] que le pays se tienne debout, se lève, et parle au monde. Ce qui nous menace, c’est une atteinte grave à la démocratie », a expliqué Hollande. Avant de livrer ce conseil à celui qui sera élu dans un an : « Bien prendre conscience que le temps est court. » Son quinquennat a pourtant parfois des airs de long calvaire.

 

Publié dans Politique

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