Humour fluo

Publié le par Laute Alain

On n'arrête pas le progrès ! (photos et dessin Benzl internet).On n'arrête pas le progrès ! (photos et dessin Benzl internet).On n'arrête pas le progrès ! (photos et dessin Benzl internet).

On n'arrête pas le progrès ! (photos et dessin Benzl internet).

J'imagine la tête du mec qui a bouffé le mouton, le matin dans son chiotte en voyant le bout de son gland se mettre à clignoter vert fluo. Mi-homme, mi-martien, la trompe en couleur.

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UN MOUTON OGM MANGÉ PAR ERREUR

Manger une agnelle dotée d'un gène de méduse, ça ne fait rien. Mais la commercialiser,c'est interdit. C'est l'histoire comico-sérieuse qui vient de survenir à la suite d'une erreur puis d'une tentative de la dissimuler dans un laboratoire de l'Inra, l'Institut national de recherche agronomique.

L'histoire commence dans un laboratoire et une structure expérimentale du centre INRA de Jouy-en-Josas (Yvelines). Les scientifiques y conduisent des expérimentations animales, dans l'objectif médical de la cardiologie humaine. Le programme cherche à réaliser et comprendre la greffe de cellules pour restaurer une fonction cardiaque défaillante suite à un infarctus du myocarde. Pour évaluer la viabilité de telles greffes, localiser et suivre l'évolution des cellules utilisées les biologistes ont recours à une astuce très répandue dans les labos. Introduire un gène récupéré sur une méduse ((Aequorea victoria) qui code pour une protéine baptisée «GFP» (Green fluorescent protein). Il est alors possible de repérer par fluorescence les cellules choisies. Ce procédé est si courant et utile en laboratoire que ses inventeurs ont reçu le Prix Nobel de chimie en 2008 comme expliqué dans cette note d'octobre 2008. Cette protéine ne présente aucune toxicité ni pour les animaux génétiquement modifié ni pour d'éventuels prédateurs de ces animaux.

COMMERCIALISATION INTERDITE

Dans le cadre de ses élevages pour des travaux de recherche, il arrive à l'Inra de se retrouver avec des animaux "surnuméraires", qu'elle peut commercialiser. Sauf si leurs caractéristiques l'interdisent d'un point de vue réglementaire ou sanitaire. C'est le cas - réglementaire - pour cette agnelle, issue d'une brebis génétiquement modifiée, mais qui n’exprimait pas cette protéine. Cette agnelle appartenait, au titre de la réglementation en vigueur, aux organismes génétiquement modifiés du groupe I, «dont le risque pour la santé humaine et pour l'environnement est nul ou négligeable». Toutefois, sa commercialisation est interdite. Or, elle a été transférée le 5 août 2014 vers un abattoir partenaire de l'Inra et sa carcasse vendue à un particulier le 28 octobre 2014.Mais l'affaire ne se limite pas à cela, car, indique un communiqué de l'Inra publié ce matin, «cette infraction à l’article L 536-4 du Code de l’environnement a été dissimulée à la hiérarchie du centre de recherche à l’initiative d’un agent jusqu’au 5 novembre 2014. Après information des ministères compétents, l’incident a fait l’objet d’une enquête administrative interne dès le mois de décembre et des mesures ont été rapidement prises (suspension de toutes les ventes de bétails, suspension conservatoire de l’agent ayant dissimulé la mise sur le marché, arrêt des expérimentations et destruction de tous les matériels génétiquement modifiés sur le site de l’Unité concernée). Le rapport rendu en avril 2015 pointe des tensions et dysfonctionnements au sein de la structure où était gardée l’agnelle, ainsi que des comportement individuels incompatibles avec les missions relevant du service public de la recherche».

Après avoir reçu le rapport complet sur cette affaire, la direction de l’Inra a signalé les faits au Procureur de la République de Meaux le 15 juin 2015, en lui communiquant l’ensemble des informations et documents en sa possession sur cette affaire sans précédent.

C'est pour un "couteau suisse de labo" que le Nobel de chimie 2008 a été décerné, ce matin, aux Américains Martin Chalfie etRoger Y. Tsien et au Japonais Osamu Shimomura. Une sorte d'espion moléculaire pour suivre "à l'oeil" des processus biologique en leur accrochant une protéine qui réagit par une belle couleur verte lorsqu'on l'excite par la lumière idoine, bleue et ultraviolette. C'est donc  "pour la découverte et le développement de la protéine fluorescente verte", la protéine GFP, que le prix à été donné. Tout collégien ou lycéen ouvrant un manuel de biologie en fait l'expérience sans le savoir en regardant des images sous microscope où le fameux vert apparait, soulignant les endroits où il faut porter son attention.

Cette protéine, à l'origine, est observée pour la première fois dans la méduse Aequorea Victoria en 1962 dont elle fait fluorescer le bord du corps. Mais encore fallait-il un travail minutieux et innovant pour permettre son utilisation dans les laboratoires, afin de mettre le microscope sur des phénomènes auparavant invisibles, comme le développement de cellules cancéreuses.  

L'académie de Stockholm récompense donc non seulement "la découverte initiale de la GFP"mais aussi "une série de développements importants qui ont conduit à son utilisation comme instrument de classification en bioscience" selon le comité Nobel. "Cette protéine est devenue l'un des outils les plus importants utilisés dans la bioscience contemporaine", a indiqué le comité Nobel dans ses attendus.

Osamu Shimomura, né en 1928 à Kyoto, a longuement travaillé dans les laboratoires américains, notamment à Boston. Martin Chalfie, né en 1947, est professeur de biologie à l'Université Columbia à New York. Roger Tsien, né en 1952, est professeur depuis 1989 à l'Université de Californie à San Diego.

L'origine de l'affaire remonte à 1955, lorsque Osamu Shimomura, à l'Université de Nagoya, se demande pourquoi des restes de la méduse Cypridina se mettent à exhiber une couleur verte quand on les arrose avec de l'eau. En moins d'un an Shimomura réussit là où un senior scientist américain échouait depuis plusieurs années : il tient dans la main une protéine qui, à poid égal, fluoresce 37 000 fois plus fort qu'un morceau de la bête. Sa découverte fait grand bruit et booste sa carrière : il est illico recruté par la prestigieuse Université de Princeton (New Jersey, USA). C'est là qu'ilextrait des protéines de 10 000 méduses. C'est là qu'il découvre une autre protéine, en très petite quantité, qui sera la GSP. Puis en 1979, établit quel est le groupe chimique, un chromophore qui absorbe l'énergie dans les longueurs d'ondes bleues et UV et la réémet en vert (longueur d'onde plus grande), responsable de cette illumination. Et enfin, comprend comment l'exciter avec une lumière ultraviolette.

Les choses en étaient là lorsque Martin Chalfie, en 1988 a une "brillante" idée. Il travaille alors sur l'un des animaux fétiches des biologistes, le petit vers Caenorhabditis elegans. Une bestiole qui a le bon gout d'être transparente. Et si j'attachais le gène qui produit ce chromophore dans Aquaria victoria à d'autres gènes que je veux étudier dans Caenorhabditis elegans de manière à les rendre visible sous lumière bleue et UV ?

Bien sûr, il fallait d'abord découvrir le dit gène. Ce qui fut fait. Puis introduit dans la bactérie Escherichia coli pour le dupliquer en série. Enfin, il fallait l'introduire dans des promoteurs actifs dans des récepteurs neuronaux de  Caenorhabditis elegans. Une couvertue du journal Science, en 1994, annonçait l'exploit.

De son côté Tsien est l'homme de l'arc en ciel. En bidouillant (savament) la protéine, il parvint à lui faire réagir dans de nouvelles couleurs, cyan, bleu, jaune et même rouge, bien que cette dernière couleur a longtemps résisté. Ouvrant alors un évantail énorme d'utilisation, tant pour la recherche fondamentale en biologie que pour des applications en biotechnologies d'usages très divers. Comme mettre en évidence une pollution en arsenic, la présence de TNT (un explosif) ou de métaux lourds en mettant en solution des bactéries génétiquement modifiées pour fluorescer lorsqu'elles sont en contact avec ces différents éléments chimiques.

Comme le souligne le texte du comité Nobel : encore une découverte complètement inattendue, donc non programmable et non finançable par un processus où chaque chercheur doit savoir à l'avance ce qu'il va découvrir et qui a déclenché une floppée d'applications elles aussi innatendues. Il reste d'ailleurs un mystère la dedans : les biologistes marins ne savent toujours pas quelle est l'utilité, pour Aequoera victoria, de cette petite lumière verte dans l'océan...

"C'est un très beau prix Nobel de chimie, qui récompense une découverte fortuite", affirme Jean Salaméro (Cnrs, Institut Curie) grand fabricant d'imagerie en mécanismes celullaires.

Par Sylvestre Huet, le 23 juin 2015

Publié dans Société

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